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L'interview portrait de la semaine:
Manon CARRARO, danseuse professionnelle

Travail sur Exode de Miquel G.Font JBA - Crédit Photo: Benoit Baxerres

Bienvenue dans le monde de la danse professionnelle ! Rencontre avec Manon Carraro, danseuse professionnelle avec qui nous allons découvrir les différentes étapes de son parcours où s'entrecroisent exigence, précision, émotion mais surtout le plaisir de pratiquer cet art sur scène. Manon nous dévoile son parcours, de son apprentissage au passage dans le milieu professionnel, mais également son quotidien de danseuse et sa vision artistique.

Bonjour Manon, merci de répondre à nos questions et de nous faire découvrir ton univers de la danse, justement, comment as-tu commencé la danse, était-ce une évidence pour toi, déjà toute petite ?

Bonjour, merci, j'en suis enchantée. J'ai commencé la danse à 3 ans, en suivant une copine. Ça a vite pris une grande importance, mais ça n'est devenu une évidence qu'après le Bac !
 
Tu intègres en 2015 le Annecy Ballet Junior (ABJ) créé par Delphine Torzuoli Macheda, lors de la saison 3, permettant d’acquérir une expérience préprofessionnelle dans le monde de la danse, pourquoi as-tu choisi cette institution dans ton parcours de danse ?

J'avais vu leur avis d'audition pour la saison à venir, et en regardant leur travail, j'ai adoré et j'ai tenté ! Fun fact, en attendant j'ai fait ma rentrée à la fac, et j'ai reçu le mail qui m'annonçait que j'étais prise à l'ABJ en sortant d'amphithéâtre ! J'ai tout plaqué pour réorganiser en une semaine ma vie à l'autre bout de la France.

Qu’as-tu appris au sein d’Annecy Ballet Junior, en termes de travail, de techniques et de valeurs humaines ?

L'ABJ est un tremplin pour de jeunes danseurs, ça t'inculque un travail sur la perception et le ressenti, loin des standards scolaires. C'est une formation qui te bouscule.

 

Crédit Photo: ABJ

Tu intègres par la suite en 2016, le « Jeune Ballet d’Aquitaine » à Bordeaux, pour franchir une nouvelle étape dans ta carrière de danseuse, pour ceux qui ne connaissent pas ce genre d’institution, peux-tu nous expliquer ce que l’on apprend là-bas ?
 

Le JBA (dirigé par Christelle Lara Lafenetre) est aussi une formation préprofessionnelle, cette dernière étant très complète. Notre semaine est rythmée par des cours techniques de tous styles (les bases classique, jazz, contemporain, mais encore danse africaine, hip-hop), jonglant avec des masterclass d'intervenants extérieurs ou des ateliers de création avec des chorégraphes de renommée internationale. Nous avons touché au chant, au théâtre, au travail d'improvisation, aux techniques makeup, au pilates... Nous étions aussi suivis par un micro nutritionniste, une psychologue et un coach sportif.

 

Quelle est la création à laquelle tu as participé qui t’a le plus marqué au sein du « Jeune Ballet d’Aquitaine » ?

C'est sans hésiter "Exode" de Miquel G. Font, chorégraphe de la compagnie Habemus Corpus ! C'était un travail hyper intense pour la tête, et hyper humain pour le coeur. Sa manière de travailler m'a marquée en conciliant rigueur et gentillesse.

Jeune Ballet d'Aquitaine

On se doute que l’exigence dans ce milieu artistique est indispensable et primordiale, cette exigence a-t-elle joué un rôle majeur dans ta personnalité tant au niveau du caractère que dans ta façon de travailler les chorégraphies ?

Je dirais que oui, par exemple, je tiens à une bonne hygiène de vie, et dans ma façon de travailler, je suis intransigeante sur les comptes ! Je note toutes les chorégraphies que j'apprends dans des carnets en détaillant les X8.
 
L’exigence passe également par des entraînements spécifiques au quotidien (Assouplissements, étirements, cardio…), comment t’entraines-tu dans la semaine pour maintenir une très bonne condition physique ?

Question difficile, parce que mes semaines ne se ressemblent jamais ! Ça dépend des périodes, si c'est un moment où j'ai beaucoup de répétitions, je ne travaille pas personnellement. Sinon, je fais entre 10 et 20 minutes de réveil corporel, renforcement musculaire et assouplissements le matin. Pour le reste, c'est la vie courante qui me maintient, la randonnée en montagne, une après-midi au parc avec un ami breakeur pour travailler des équilibres..; Bref, il y a toujours moyen de travailler quelque chose !

La danse est bien plus qu’une discipline sportive en libérant le corps et l’esprit, qui apporte du positif, une liberté dans la vie, aussi bien sur le plan mental que physique. Quel impact a la danse sur ta vie personnelle ? Quelles émotions te procure la danse professionnellement et personnellement ?

Je dirai que ça impacte ma place dans la société. Bien qu'il faille réussir à faire tous ses cachets, je me sens libre d'organiser mon emploi du temps de l'année à peu près comme je l'entends. Et ça me rend heureuse. Je suis quelqu'un qui s'ennuie assez, qui rêve beaucoup, et qui angoisse dans la routine, alors je ne peux pas imaginer une seconde une vie en CDI avec un nombre imposé de jours "libres".


Pour les émotions, c'est grandiose, à chaque levé de rideau, à chaque studio de répétition, à chaque déplacement professionnel, je sens une joie intense qui m'arrache un sourire et je me dis "wow... là je suis au travail". C'est incroyable !

Comment te définirais-tu comme danseuse ?

Curieuse et enthousiaste !

Quel a été le cap où tu t’es dit, ça y est je suis devenue danseuse professionnelle ?

Lorsque j'ai été prise dans la compagnie Alaia, créée et dirigée par Océanne Emery. Je travaillais déjà depuis un an et demi, mais c'était des contrats alimentaires, loin de l'artistique à proprement parlé. Lorsque j'ai intégré la troupe Alaia, je me suis dit: "Là, ça y est, tu commences vraiment à vivre ton rêve !"

On Dream de la troupe ALAIA Crédit Photo: Hervé Nguetsop

Afin de mieux te connaître artistiquement, on va passer au jeu des questions express, une question, une réponse :

- Ton style de danse favori ?


Le contemporain

- Le style de danse que tu ne danseras jamais ?


Le krump, trop, trop à l'opposé de ce que je peux produire !!
 
- La chorégraphie que tu aurais aimé danser ?


Pixel de Mourad Merzouki
 
- Avec quel(s) artiste(s) de musique aurais tu aimé danser ?

 

Avec Fakear !
 
Avec quel danseuse, danseur ou chorégraphe aimerais tu travailler ou collaborer ?

 

Avec la chorégraphe Maguy Marin, et les chorégraphes Philippe Decouflé et Mourad Merzouki
 
3 mots qui définissent ta façon de danser ?

 

Lié, étrange et improvisation
 
Le spectacle musical où tu aurais aimé te produire ?


Dans une tournée de Fakear. Mon rêve qu'il ait besoin d'une danseuse un jour !

Quelles sont les 5 chansons du moment que tu écoutes en boucle dans ton téléphone ?


Ce ne sont pas forcément des musiques du moment, mais en tout cas, ce sont celles que j'écoute en ce moment !
Il y a "Movement" de Attom, "Uprising" de Fakear, "Would You Lie" de Seeb et Alexander Stewart, "Cin cin" de Alfa et Yanomi, et j'avoue, la dernière elle craint un peu mais je suis retombée sur cette vieille musique de Nicki Minaj, "Va va voom voom", et j'aime l'ambiance !!
 
La musique qu’il faut écouter lors d’un échauffement de danse ?

 

Un truc qui motive comme pour une séance de sport, moi souvent c'est "Body" de Loud Luxury
 
La chanson ultime pour danser ?


"Song for Jo" de Fakear
 
L’animal sauvage qui te caractérise le plus ?


J'aurais dit un chat, un chat sauvage du coup ;)

Ton pêché mignon gastronomique ?

 

Les sushis !
 
Le dîner idéal avec 4 personnalités vivantes ou disparues ?


Fakear, George Brassens, Simone Veil, et un prêtre shintoïste quelconque !
 
On va revenir sur ta vie artistique et professionnelle, en 2019, tu réalises plusieurs prestations avec CadiJo, qui n’est autre que ton papa. Qui a eu l’idée de vous réunir artistiquement, je pense notamment à votre prestation au Pôle Evasion Ambares, comment as-tu vécu ce moment ?

L'idée est partie de mon examen de fin d'année au JBA ! On devait présenter un solo, et j'ai décidé que ma musique serait mon père. On était en totale improvisation tous les deux, on se guidait l'un l'autre. Suite à la prestation du Pôle Évasion, on a décidé de pousser le projet plus loin, c'est un sujet intéressant qu'on pouvait approfondir. On a donc retravaillé ce duo jusqu'à en faire une pièce de 30 minutes.

Tu as ensuite fait des impros en duo avec Cadijo, la profonde relation père/fille, tu disais d’ailleurs « Ma danse le fait jouer et sa musique me fait danser», attendais-tu ces moments avec impatience, de pouvoir partager des émotions artistiques avec ton papa ?

Oui, ce sont des moments riches, se comprendre dans le fonctionnement du métier et le vivre ensemble, c'est assez  fou !

HarmoniKAdanse avec Cadijo

Comment as-tu vécu moralement et physiquement la période de confinement difficile de 2020, loin des scènes et des studios de danse ?

Très mal. À ce moment, là j'étais sur le point de finaliser ma première année de cachets, mais le confinement est tombé avant, j'ai donc vécu la période Covid avec zéro revenus. Le moral était au plus bas, les choses empiraient, et un énorme point d'interrogation faisait office d'horizon...
Je m'entrainais chez moi, il y avait tous les jours des cours en visio ! Ça a créé des moments forts parmi les danseurs ! Mehdi Kerkouch par exemple, a créé un festival de danse en visio, c'était incroyable ! C'est aussi à ce moment là qu'avec mon papa, on a décidé de retravailler et de monter sérieusement notre duo ! On avait du temps tous les deux !!

Destination-live, t’a découvert sur scène le 31 décembre dernier au Théâtre du Casino Barrière de Bordeaux pour le magnifique spectacle « Remember » avec le groupe Disco Inferno, un show très abouti, précis et exigeant dans les chorégraphies avec beaucoup de changements de costumes, peux tu nous expliquer comment on se prépare pour ce genre de spectacle, tes techniques de mémorisation des chorégraphies, mais aussi des répétitions au lever de rideau ?

Je précise avant tout que ce spectacle est de L'atelier du Spectacle, dirigé par Laurent Taris ! Pour répondre à la question, ce genre de show demande énormément de préparation ! On commence les répétitions plusieurs mois à l'avance, et on ne les termine que le matin du show. Il y a des tonnes de détails très précis à retenir et à exécuter parfaitement, de la manipulation d'accessoires à maîtriser, les émotions dues à la fatigue à contrôler... c'est beaucoup de travail pour un gros challenge ! Mais Laurent gère tout ça d'une main de maître alors c'est un plaisir !

Remeber par l'Atelier du Spectacle

Qu’est-ce qui te plaît le plus dans le métier de danseuse ?

Me sentir libre dans ma profession. J'ai conscience de faire partie de la société, de contribuer à l'économie du pays, bref d'être dans le système, mais je n'en ressens pas l'enchainement ! Je suis heureuse et c'est assez pour affirmer que j'ai réussi ma vie !

Est-ce que tu as une anecdote artistique à nous raconter ou qui t’es arrivée sur scène ?

Oh pleins ! Des problèmes de costumes, une épingle à nourrice qui lâche et se plante dans la peau durant tout le tableau, une bottine de cancan trop grande qui fuse de mon pied en plein battement, une gabrielle (les plumes sur le dos) si lourde qu'elle manque de me faire faire un malaise...

Quels sont tes futurs projets artistiques ?

Continuer sur ma lancée, que j'apprécie ! J'aimerais aussi commencer à toucher à l'aérien un peu, et intégrer une compagnie vraiment contemporaine.

Enfin pour finir Manon, quels conseils donnerais-tu à des personnes qui souhaitent devenir danseuse ou danseur professionnelle comme toi ? 

Se demander chaque jour si ça nous fait vraiment plaisir de faire ça. Ce n'est vraiment pas un métier que l'on peut faire pour d'autres motivations que la passion. Ensuite d'y croire, peu importe les moments difficiles, il y en aura, ce n'est pas un chemin aussi plat que décrocher un diplôme et signer un CDI.
Ne pas hésiter à aller fureter un peu partout, même si ce n'est pas l'endroit ou le contrat qu'on convoite vraiment, ça fait des contacts, et dans ce milieu votre aide la plus précieuse sera d'avoir des connaissances !

Merci Manon !


Merci à vous :)

Arnault pour Destination-Live.com - Septembre 2023

Retrouvez l'actualité de Manon Carraro: 

Instagram: Manon Carraro

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